Maryse
Cordesse, présidente des Rencontres d'Arles dans les annés 80, et l'une
des figures clés de l'histoire de lÉcole Nationale Supérieure de la
Photographie, explique l'identité du festival et son importance dans le
contexte du paysage culturel français.
Photographie.com :
Vous avez été présidente des Rencontres d'Arles, vous avez vu cette
manifestation grandir et évoluer. Le festival d'Arles a-t-il tenu toutes
ses promesses ? Comment décririez-vous l'apport du festival à la
photographie ?
Je pense que les Rencontres
ont beaucoup aidé la France à attraper son retard en photographie. Il
faut comprendre que, lorsque j'ai commencé à m'occuper des Rencontres en
1977, la photographie en France n'existait pas : les conservateurs
français n'étaient pas intéressés, et ce vocable n'existait pas,
administrativement, au Ministère de la Culture. Il n'y avait pas grande
chose au Centre Pompidou, qui avait un peu raté le coche.
Je me souviens que lorsque je
disais à mes amis ce que je faisais, tout le monde se moquait de moi,
en me disant : la photographie n'est pas un métier ; c'est soit un
studio où l'on fait des photographies de mariage, ou des reporters avec
leurs célèbres gilets beiges.
Je dirais donc qu'au début,
cette manifestation était faite presque pour les photographes, pour
qu'ils puissent se rencontrer, discuter, montrer leurs photographies,
etc. Il était très difficile de s'imaginer que les Rencontres
prendraient un tel essor. Jusqu'à la fin des années 80, et peut-être
même au-delà, le festival était essentiellement composé d'un cercle
que j'appellerai des "initiés" (c'était un public nouveau, assez jeune).
Les gens venaient voir les expositions, mais aussi s'initier à la
photographie dans le cadre des stages, ou fréquenter les photographes
plus connus.
Pendant de longues années, il
était très important que ce cercle d'initiés fasse la structure et le
fond du public. C'est depuis une quinzaine d'années, et plus
particulièrement depuis la venue de François Hébel, que le public des
Rencontres s'est élargi. Maintenant les gens viennent même s'ils ne
connaissent pas forcément la photographie, tout comme l'on va à un
concert sans avoir jamais joué deux notes sur un piano. Le public vient
parce que la photographie est entrée dans les moeurs, et aussi à cause
de l'argent que l'on investit aujourd'hui dans la photographie.
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